Rencontre avec Christophe Lebrun

Après avoir participé au Marathon du Pôle Nord en 2011, il boucle durant l’été et l’automne 2012, avec son amie Frédérique, les deux premières étapes de leur Grand Chelem Marathon.  Le Grand Chelem Marathon, c’est un tour du monde durant lequel ils courent un marathon sur chacun des cinq continents dans un lieu insolite où aucun marathon n’a jamais été couru – les volcans du Vanuatu jusqu’aux lacs de lave en fusion ou le Salar d’Uyuni en Bolivie à près de 4000 mètres d’altitude.  Rencontre avec Christophe Lebrun, un sportif 100% nature.

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Vous avez couru le Marathon du Pôle Nord en 2011. Vous courez en 2012 et 2013 votre Grand Chelem Marathon. Pourquoi avez-vous décidé de courir ces marathons de l’extrême ?

J’ai toujours fait beaucoup de sport.  Il y a dix ans, j’ai passé près d’une année sur un lit d’hôpital. Je ne savais pas si je pourrais remarcher un jour. Je m’étais alors dit que si je m’en sortais, je ferais quelque chose de fort, exceptionnel, afin de transmettre de l’espoir à ceux qui traversent des moments de souffrance. Après de longs mois de rééducation, je suis parvenu à remarcher puis à recourir. J’ai alors participé à des raids par étapes sur plusieurs jours. C’est en témoignant de cette expérience que je me suis rendu compte que je pouvais aider d’autres personnes. Courir utile, établir un parallèle symbolique entre « vaincre la maladie », « atteindre un sommet » et « franchir la ligne d’arrivée ». Je me suis rapproché de l’association A Chacun Son Everest !, fondée par la célèbre alpiniste française, Christine Janin. Aujourd’hui, les marathons extrêmes du Grand Chelem Marathon sont dédiés aux enfants de cette association.

Quelle a été votre préparation spécifique au Marathon du Pôle Nord ?

Je me suis entraîné une fois par semaine, à raison de 2 à 3 heures par séance, en chambre froide à partir du mois de janvier jusque mi-mars. Avec le recul, je me rends compte que j’ai peut être fait trop d’entraînements en chambre froide. C’est utile pour tester le matériel mais ce type d’entraînements fatigue énormément. Je me suis aussi entraîné à courir longtemps et en montagne. J’ai également couru la SaintéLyon en décembre 2010, l’année où il a fait le plus froid sur cette course. Je crois que j’étais le seul concurrent à être ravi des conditions climatiques qui me préparaient pour le pôle Nord !

Quels souvenirs gardez-vous du Marathon du Pôle Nord ?

Des sensations intenses et inédites. Le pôle Nord est un lieu unique au monde. J’en garde le souvenir d’une lumière exceptionnelle, de la limpidité de l’air, d’un ciel bleu, du soleil qui nous tourne autour, du silence, d’un engagement total pour aller au bout de soi-même. Le mental prend le dessus sur le physique pour franchir la ligne d’arrivée. Je garde de beaux souvenirs aussi des moments de partage et d’échange avec les enfants d’A Chacun son Everest ! Nous nous sommes rencontrés à Chamonix durant la préparation de cette course, mais aussi au retour du pôle.

Nous allons courir le Marathon du Pôle Nord en avril 2013, quels conseils nous donneriez vous ?

Préparez minutieusement votre équipement. Cet équipement peut être différent pour chacun de vous deux. Le plus important est qu’il vous convienne. Il faut également vous confronter au froid et faire des sorties longues en montagne, sur des glaciers. N’hésitez pas à courir plusieurs heures en continu. A marcher longuement aussi. Et surtout, n’écoutez jamais toutes les personnes qui vous diront : « Ce n’est pas possible » !!

Comment vous est venu l’idée de faire un tour du monde pour courir un marathon inédit sur chacun des cinq continents ? 

C’est une conjonction de plusieurs raisons. Avec Frédérique, nous avons imaginé et dédié ce projet aux enfants d’A Chacun son Everest ! Nous sommes passionnés de course à pied, avec une approche très nature. Nous voulions ainsi créer un projet qui allie les notions de voyage, de partage et la course à pied. Nous ne cherchons pas la performance, ni les records. Ce qui importe, c’est de franchir la ligne d’arrivée, tout comme les enfants se battent pour vaincre leur maladie. Ce qui nous motive, c’est de courir la distance du marathon, de franchir les obstacles, de surmonter les doutes. Courir là où personne n’a jamais couru est une belle source d’adaptation. La plupart des marathons du Grand Chelem sont des premières, dédiées aux enfants d’A Chacun son Everest !

Et surtout, n’écoutez jamais toutes les personnes qui vous diront : « Ce n’est pas possible » !!

Comment s’est passée la seconde étape qui a eu lieu fin octobre sur le Salar d’Uyuni en Bolivie ?

Ce marathon a été particulièrement difficile…Nous devions faire face à des conditions particulières : un effort continu et intense sous hypoxie, une chaleur importante et une réverbération intense due à la blancheur immaculée du désert de sel – qui ressemblait par certains côtés à la banquise.  Un médecin nous a accompagnés. Nous avions également un caisson hyperbare en cas de mal aigu des montagnes. Nous ne connaissions personne qui ait couru un marathon à une telle altitude, nous n’avons pas pu bénéficier de conseils de prédécesseurs. Nous venons de publier le récit de cette course sur le blog (http://www.grand-chelem-marathon.com/). Même si cela a été très difficile, nous avons beaucoup appris de cette expérience. Les Boliviens nous ont regardés avec des grands yeux ! Le Salar d’Uyuni se parcourt habituellement en 4×4, pas à pied et encore moins en courant ! C’était tout à fait étonnant pour eux de nous voir nous engager dans cette aventure et encore plus de nous retrouver quelques heures plus tard à l’autre bout du Salar après cette traversée du désert.

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Connaissez-vous d’ores et déjà les destinations des trois dernières étapes du Grand Chelem Marathon ?

Pas toutes. Les destinations et les parcours sont en cours d’élaboration.

Des scientifiques vous suivent afin d’étudier la réaction du corps humain lorsqu’il est confronté à des conditions extrêmes ? Ont-ils déjà tiré des conclusions de vos deux premières étapes du Grand Chelem Marathon ?

Les laboratoires qui nous suivent n’ont pas encore tiré de conclusions. Actuellement, nous relevons et collectons de nombreuses informations. Il faudra sans doute entre un an et un an et demi pour les exploiter et en tirer des conclusions. Ceci étant, tout ne sera peut-être pas exploitable car nous ne courons pas dans des conditions de laboratoire.

Combien de marathons et / ou ultra-trails avez-vous couru ? Lesquels vous ont le plus marqué ?

Je n’ai pas couru beaucoup de marathons, deux seulement avant le Marathon du Pôle Nord. Mes courses de prédilection étaient jusqu’à présent les grands raids par étapes. J’ai ainsi couru les Foulées de la Soie en Chine en 2007, les Foulées de Cappadoce en Turquie en 2008, les Foulées de Samarcande en Ouzbékistan en 2009.

Quelle est la compétition la plus difficile à laquelle vous ayez participé ?

Le Marathon du Pôle Nord à cause du froid, de la durée et de l’engagement que cela implique.

Pratiquez-vous d’autres activités sportives ? Lesquelles ?

Le triathlon, le ski, la randonnée en raquettes, le parapente, l’escalade.

Avez-vous vécu d’autres expériences dans les régions polaires (voyage, trek, défi sportif, etc) ?

Non. Ceci étant, avant de courir le Marathon du Pôle Nord, j’ai fait escale au Spitzberg. C’était l’occasion de randonner sur neige et glace et de découvrir le glacier de Longyearbyen.

Avez-vous déjà des projets pour 2014, après le Grand Chelem Marathon ? 

Nous avons avant tout 2013 en point de mire et encore trois étapes du Grand Chelem à réaliser. Toute notre attention est portée sur ce projet.

Entretien réalisé par Runners to the Pole en décembre 2012.